L'Humeur
Bertrand Cantat : l’impossible rédemption ?
Bertrand Cantat a-t-il le droit de chanter ? La famille de Marie peut-elle l’injurier ? Les Français ont-ils leur mot à dire ? La violence et la haine que provoque le retour de l’ancien leader de Noir Désir sont-elles l’unique réponse à sa demande de réinsertion ?
Capture www.bertrandcantat.com
Deux camps s’affrontent. Une société est divisée. La douleur d’une famille est ravivée. La vie d’un homme est suspendue. La violence des propos choque. La haine s’insinue. Chacun prend parti. Bertrand Cantat est au cœur d’une polémique comme on les déteste. Le tribunal médiatique et populaire s’est substitué à la justice des tribunaux. La semaine dernière, le chanteur s’est fait lyncher à Grenoble. Répondre à la violence par la violence… Est-ce vraiment la solution ?
On peut comprendre la colère de Nadine Trintignant, la mère de Marie, qui a demandé sur le plateau de "C l'hebdo", sur France 5, qu’on lui cite "un seul assassin que l'on a applaudi après". On peut entendre les mots de Samuel Benchetrit, l'ex-époux de Marie Trintignant avec qui elle a eu un petit Jules, lorsqu’il parle d’un "lâche", d’un "faible".
Mais, on préfère la pudeur d’un père, Jean-Louis Trintignant, qui se sent coupable de la mort de sa fille, car il devait "venir la retrouver ce soir-là". On préfère le silence d’un autre ex-mari, François Cluzet, qui a promis à son fils Paul qu’il ne ferait pas plus de commentaires sur cette histoire.
Marie Trintignant est morte en 2003 sous les coups de l'ex-leader de Noir Désir. Bertrand Cantat a été condamné à huit ans de prison en Lituanie. Transféré en France, il a été libéré en 2007 après avoir purgé plus de la moitié de sa peine en détention.
Certains estiment que le chanteur a payé sa dette à la société et qu’il a le droit de refaire sa vie. D’autres pensent qu’il a perdu ce droit à tout jamais. En France, Bertrand Cantat aurait sans doute écopé d’une condamnation à une peine plus lourde (environ dix ans).
La famille de Marie ne pourra jamais oublier. Mais la justice n’est pas le bras armé de la vengeance personnelle. Certaines condamnations sont assorties de restrictions, de privations d’une partie de ses droits. Sans casier judiciaire vierge, il est impossible d’exercer certains métiers. C’est peut-être de ce côté-là qu’il aurait fallu chercher pour empêcher le retour de Bertrand Cantat. Plutôt que dans la haine, la violence et la démesure.