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Ces électeurs "perdus" qui ont trouvé leur candidat en Trump

par James Oliphant, Chris Kahn et Megan Cassella

WASHINGTON/NEW YORK (Reuters) - Ils sont blancs, plutôt âgés. Ils ne se sont pas rendus aux urnes depuis des lustres. Certains n'ont même jamais voté. Pourtant, cette fois, tous l'affirment: Donald Trump, le milliardaire populiste aux propos controversés leur a donné envie de participer à l'élection présidentielle de novembre prochain aux Etats-Unis.

Et pour être sûrs que "leur" candidat sera bien retenu par le Parti républicain au terme des primaires qui vont se tenir dans chaque Etat à partir du 1er février, ils iront justement donner de leur voix.

C'est le cas de Ted Wade, 51 ans. Il n'a pas voté depuis près de 25 ans, depuis la candidature d'un autre milliardaire, le Texan Ross Perot, qui s'était présenté en 1992 en "indépendant" contre le républicain George Bush père et le démocrate Bill Clinton.

Cette fois, Ted Wade ira voter à la primaire républicaine du Nevada le 23 février. Trump, dit-il, n'est "pas un politique". Il peut mettre fin au "chaos" qui règne à Washington.

RÉSERVOIR DE VOIX

Environ un Américain sur dix qui prévoient d'aller voter en 2016 le fera pour la toute première fois ou pour la première fois depuis longtemps. Et auprès de ceux-là, Donald Trump détient un avantage décisif, selon un sondage Reuters/Ipsos mené entre le 1er juin et le 31 décembre 2015.

L'enquête révèle que 27,3% de ces "nouveaux" électeurs disent vouloir voter Trump, soit davantage que le score qu'il réalise auprès des électeurs indépendants ou républicains (22,5%). Le sénateur du Texas Ted Cruz, qui émerge comme son principal rival, ne parvient lui à attirer que 3,4% de ces électeurs retrouvés. Un autre candidat, le sénateur Marco Rubio de Floride, ne fait guère mieux avec 4%.

Ces électeurs offrent au magnat de l'immobilier un réservoir de voix qui pourraient être décisif, tant à la primaire que pour la présidentielle proprement dite et notamment dans les Etats qui autorisent le vote anticipé comme l'Iowa et la Caroline du Sud, où Ted Cruz bénéficie d'un fort soutien auprès des électeurs conservateurs plus traditionnels.

"Je suis fatigué du chaos entre les démocrates et les républicains et je veux donner une chance à quelqu'un qui, je pense peut faire la différence", déclare Ted Wade à propos de Trump.

Donald Trump ne s'en cache pas: il a fait des électeurs "perdus" comme Ted Wade une de ses priorités. Son discours économique protectionniste et ses diatribes de bateleur contre les immigrés et les musulmans - il a souhaité interdire l'accès du territoire américain à ces derniers - est un message adressé aux Américains les plus déshérités, qui ont le sentiment d'être oubliés des deux grands partis, républicain et démocrate.

"J'ai consacré toute ma campagne à augmenter le nombre de gens qui veulent participer, et participeront, à ce cycle électoral", écrivait l'homme d'affaires dans une récente tribune publiée dans USA Today.

TOUTE PREMIÈRE FOIS

A Tucson, dans l'Arizona, Renay Cunningham, 56 ans, raconte que la politique ne l'a jamais vraiment intéressée. Elle prévoit pourtant de mettre pour la toute première fois un bulletin dans l'urne en 2016. Et ce sera pour Donald Trump dont les propositions pour réduire l'immigration illégale l'ont convaincue. Le promoteur entend construire un mur géant à la frontière sud des Etats-Unis et de demander au Mexique d'en assumer les frais.

"Il nous faut un piranha et c'est, de fait, un piranha", dit-elle.

Ce n'est pas la première fois qu'un candidat part à la pêche aux voix des abstentionnistes traditionnels. Barack Obama l'a fait avec succès en 2008. Celui qui est devenu le premier président noir de l'histoire des Etats-Unis avait beaucoup recruté chez les nouveaux électeurs au sein de la minorité hispanique, hommes et femmes, dans les centres urbains. Trump, au contraire, est parti à la recherche de l'électeur mécontent, soit un blanc, d'un certain âge, moins éduqué que le votant moyen.

Les électeurs "perdus" ou "nouveaux" sont les électeurs qui dans les sondages Reuters disent ne pas avoir voté lors des deux précédentes campagnes présidentielles et aux élections législatives et sénatoriales de mi-mandat au Congrès.

Et les résultats se concentrent uniquement sur les sondés qui disent être pratiquement sûrs de voter à la présidentielle de novembre. Il s'agit des réponses de 3.440 "nouveaux" électeurs républicains et indépendants, un échantillon qui a une marge d'incertitude de deux points de pourcentage.

"IL CONNAÎT LES AFFAIRES"

Pour Jan Leighley, spécialiste de la participation électorale à l'American University, il est trop tôt pour comparer les "nouveaux" électeurs de Trump avec ceux qui ont voté pour le candidat Obama en 2008. Elle souligne qu'une fois posée l'intention de voter, il faut encore se rendre aux urnes.

"L'équipe de campagne d'Obama a fait du porte-à-porte. Ils ont fait la tournée de quartiers entiers. Je ne sais pas si Trump a l'infrastructure de campagne pour s'assurer que les gens qui ont été 'harponnés' seront conduits aux bureaux de vote le jour de l'élection", dit-elle.

L'équipe de Trump affirme qu'elle en a les moyens et dit qu'elle fait le suivi avec les milliers de personnes qui assistent aux meetings du candidat new-yorkais.

En Caroline du Nord, Ronald Thomas, 49 ans, conducteur de camion et ancien de la Navy, dit que lui non plus, n'a jamais voté à une présidentielle. Sa petite amie lui dit toujours qu'il faut voter, raconte-t-il, mais il répond toujours : "Ouais, mais le bon n'est pas encore passé." Mais là, il y a Trump qui a l'air de "vraiment s'occuper des gens". Il va se renseigner pour savoir comment s'inscrire sur les listes électorales.

Il y a aussi Vince DiSylvester. A 73 ans, ce retraité du Missouri, qui travaillait dans la maintenance dit n'avoir jamais voté pour un président. Le magnat de l'immobilier lui a faire reconsidérer la question.

"C'est un homme d'affaires; il connaît les affaires. Il sait comment faire les choses", dit-il. "Et il dit ce qu'il pense. Et si vous n'aimez pas, eh bien tant pis."

(Danielle Rouquié pour le service français)

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