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Christian Estrosi contesté sur son propre terrain par le FN

par Matthias Galante

NICE (Reuters) - Le chef de file de la droite en Provence-Alpes-Côte d’Azur, Christian Estrosi, a dû réorienter ses thèmes de campagne pour tenter de l'emporter dimanche prochain face à la candidate du Front national, Marion Maréchal-Le Pen, qui l'a surclassé au premier tour sur son terrain de prédilection, la sécurité.

Le maire de Nice n'a obtenu que 26,47% des voix dimanche dernier dans la région, contre 40,55% à la nièce de Marine Le Pen qui a elle-même parlé d'une avance "inattendue".

Pire : il n’a devancé le FN que de 33 voix dans son bastion, les très sarkozystes Alpes-Maritimes, en dépit d'un solide ancrage local et d’une politique sécuritaire marquée à droite.

Avec 37,91% contre 37,90% des suffrages pour la liste frontiste menée par Olivier Bettati, un ex-UMP candidat contre lui aux dernières municipales, le député-maire de Nice n'a pas pu cacher sa déception d'être ainsi distancé dans son fief.

C'est le seul département de la région qu’il remporte et le score se révèle étonnant pour cette personnalité qui fait actuellement la pluie et le beau temps à la tête de la métropole Nice Côte-d’Azur regroupant 49 communes, après avoir été, entre autres, président du conseil général de 2003 à 2008.

Le temps de la présidentielle de 2007, où Nicolas Sarkozy, dont Christian Estrosi est très proche, obtenait son meilleur score français dans ce département, semble loin.

"Leur image est très liée, ça s’est vu dans les bons moments mais aussi dans les moins bons à l’image de ces élections qui comptent beaucoup de déçus du sarkozysme votant pour le Front national", analyse Marie-Ange Grégory, politologue de l’Université de Nice Sophia-Antipolis.

"Les Alpes-Maritimes ne sont pas dans une bulle et n’échappent pas au contexte national marqué par les attentats du 13 novembre", souligne-t-elle.

NICE, LABORATOIRE DE LA SÉCURITÉ

Si Christian Estrosi a conservé une longueur d’avance à Nice intra-muros (42,03% contre 33,98% au FN) ainsi qu’à Cannes et Antibes, il a en revanche été battu à Saint-Laurent-du-Var et Cagnes-sur-Mer, deux communes importantes de la métropole qu’il dirige, ainsi que "dans des villages de sa circonscription dans l’arrière-pays", constate la politologue.

Il s’est aussi incliné à Grasse et Menton, une ville frontalière avec l’Italie concernée par un afflux de migrants record depuis cet été.

L’ancien ministre, qui se revendique comme un champion des questions liées à la sécurité, n’a pas réussi à faire la différence sur un terrain où il est concurrencé par le FN.

Ce n’est pourtant pas faute de s'illustrer en la matière, au sein de sa commune dont il a fait une sorte de laboratoire.

Il a par exemple multiplié le nombre d’arrêtés municipaux -souvent contestés en justice - comme l’interdiction des drapeaux étrangers ostentatoires, de la mendicité, ou limitant les horaires d'ouverture des épiceries de nuit.

Il a fait de la police municipale niçoise l'une des plus importantes de France et déployé un arsenal de 1.254 caméras de vidéoprotection dont 170 récemment installées dans le tramway.

Le dispositif, que l'élu aimerait transposer dans les trains régionaux s’il était élu président de la région, a permis "3.508 réquisitions judiciaires et 2.945 personnes interpellées pour la période du 23 mars 2010 au 7 décembre dernier", selon des chiffres fournis par l’hôtel de ville.

VIRAGE À GAUCHE

Le résultat du premier tour oblige toutefois Christian Estrosi à modifier quelque peu sa campagne pour tenter de séduire des électeurs de gauche, le PS ayant décidé de retirer ses listes en Paca pour faire barrage au Front national.

Il a ainsi fait des propositions pour la "sanctuarisation du principe de la libre création pour les artistes", qui sont opposés à la politique de réduction des subventions à leur secteur annoncée par Marion Maréchal-Le Pen.

Des artistes, dont l'acteur Charles Berling, classé à gauche, devaient d'ailleurs tenir ce jeudi après-midi à Toulon une conférence de presse pour appeler à voter pour Christian Estrosi, en sa présence.

"Il a commencé sur le thème de la sécurité avant d’en parler beaucoup moins à la fin en se plaçant dans un esprit de rassemblement en vue du second tour", dit Marie-Ange Grégory.

Un avis partagé par les Républicains locaux.

"Un coup il est à l'extrême gauche, un coup à l'extrême droite. En plus, en face, il y a la jeunesse et la nouveauté" s’inquiète le conseiller d'un élu azuréen qui pense la victoire possible "mais serrée".

Le report des suffrages de la gauche et la mobilisation des quelque 1,7 million d'abstentionnistes du premier tour seront décisifs.

Selon un sondage TNS Sofres-OnePoint pour Le Figaro et LCI publié mercredi, la victoire lui est promise : Marion Maréchal-Le Pen recueillerait 46% des suffrages, contre 54% pour Christian Estrosi, qui est appelé à changer de politique s'il est élu grâce aux voix de la gauche.

(Edité par Yves Clarisse)

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