Retrouvez Weekly sur Facebook

Walhalla

Filibuster ou l'art de l'obstruction parlementaire

Les Américains parlent de "filibustering". En France on préfère le terme d'obstruction parlementaire. Mais en clair, ça veut dire quoi ?

Ça s’est passé cette semaine. Une sénatrice américaine s’est illustrée dans une tentative d’obstruction parlementaire. Une quoi ? Elle s’est livrée au "filibuster". Ça ne vous avance pas ? Plus simplement, elle a pris la parole pendant plus de onze heures afin d'empêcher le vote d’une loi qui prévoyait d'interdire l'avortement après 20 semaines de grossesse et de durcir les conditions d'exercice pour les cliniques pratiquant l'IVG.

Une véritable performance, que l’on la doit à la sénatrice Wendy Davis. Le règlement est très strict : interdiction d'aller aux toilettes, de manger, de boire, de s'asseoir, de s'appuyer sur son bureau ou de changer de sujet. Après trois rappels à l'ordre, l'orateur est obligé d'abandonner. Et c'est ce qu'elle a été contrainte de faire quelques minutes avant minuit. Mais elle a tout de même gagné, car le vote a été trop tardif et donc invalidé. Cette victoire est provisoire, car le texte reviendra en séance et sera sans doute adopté. Mais Wendy Davis aura fait partager son combat à tous les Etats-Unis. Et au reste du monde.

Cette pratique d’obstruction est un grand classique de la vie parlementaire américaine. A l’origine, le terme de "flibustiers" désignait les aventuriers américains cherchant à renverser les gouvernements d’Amériques centrales. Il faudra attendre 1953 pour qu’il entre dans la sphère politique lorsque le sénateur Wayne Morse tenta, pour la première fois, d'empêcher l'adoption d'une loi en parlant pendant plus de 22 heures ! La règle en vigueur interdisait au président du Sénat d’interrompre un sénateur durant un discours. Wayne Morse usa (et abusa ?) de cette règle en lisant… le bottin !

Si l’on doit aux États-Unis, sa forme moderne, l’obstruction parlementaire était en réalité déjà utilisée dans la Rome républicaine antique.

Et en France ? Ce n’est pas le combat d’un seul homme. Ou d’une seule femme. C’est la bataille d’un groupe : celle des amendements. Le but ? En déposer le plus possible et provoquer la discussion autour de chacun d’eux pour que le débat dure…

La technique généralement employée est celle de la « bataille d'amendements », qui consiste à déposer un nombre extrêmement important d'amendements presque semblables et à exiger la discussion de chacun d'entre eux devant le Parlement. L'objectif de l'opposition est généralement de forcer le Premier ministre à intervenir en utilisant l'article 49, alinéa 3, généralement impopulaire jusque dans les rangs de la majorité, les députés, quels qu'ils soient, tenant aux prérogatives du Parlement. Le record est détenu par les socialistes et les communistes qui ont déposé plus de 137.000 amendements en 2006 contre le projet de loi relatif au secteur de l'énergie (la privatisation de GDF et Suez). A côté, la guerre autour du mariage pour tous fait office de petit joueur avec ses 5.000 amendements.

Et vous, quel est votre avis ? Exprimez-vous ! Réagissez à cet article.


Suivez-nous

Les auteurs