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Informatique et salaires : les femmes doivent gagner plus que les hommes !

Congélation des ovocytes, PDG de Microsoft : l'actualité des nouvelles technologies a mis à jour un mal ancien : il n'y pas assez de femmes et sont, par rapport à leurs homologues masculins, insuffisamment payées. Et si les femmes devaient en réalité gagner, non pas autant que les hommes, mais plus ?

Nouvelles technologies et travail des femmes ne s’accordent pas, c’est le triste constat qui ressort des études du marché de l’emploi ; en France certes, mais également dans tous les pays occidentaux notamment Etats-Unis. Les échos de ces derniers jours en provenance de la Silicon Valley pouvant même donner froid dans le dos.

Mais que se passe-t-il dans la Silicon Valley ?

Facebook et Apple, bien qu’ils ne l’aient point confirmé, auraient décidé de couvrir jusqu’à 20 000 dollars les frais de congélation des ovocytes. De quoi parlons-nous ? De la possibilité pour les femmes de pouvoir enfanter, passé un certain âge, sans risque. Intégrer une telle couverture dans les assurances des femmes actives est assurément une aide pour celles qui en auraient besoin ; c’est d’ailleurs le point de vue de la France, qui couvre les risques d’infertilité dans le cas d’une opération médicale pouvant altérer le processus de procréation. Ce n’est toutefois pas à ce contexte particulier auquel ont pensé ces entreprises américaines.

Quelle est donc la raison sous-jacente à une telle décision ?

Une vision pragmatique. Les femmes ont leurs enfants de plus en plus tard. Aux Etats-Unis, 20% à 35 ans, avec un taux plus élevé dans les fonctions à responsabilité. Compte tenu des risques d’infertilité avec l’âge, permettre aux femmes de ne plus choisir entre carrière et horloge biologique est en soi une avancée tant sociale qu'une avancée de la condition féminine en quelque sorte ; permettre un lissage des inégalités biologiques entre les femmes et les hommes, ces derniers pouvant procréer avec moindre danger jusqu’à plus tard.

Ces propos vous dérangent ? C’est probable.

Sexe, rôle, genre, la vision sociétale française, historiquement plus ancienne, ancrée à des valeurs judéos-chrétiennes, est toujours empreinte de patriarcat ; organisation de la société autour d’une autorité majoritairement détenue par des hommes ; les femmes devant se battre pour y faire leur place.

Si les Etats-Unis connaissent également ce contestable travers, la mixité des origines ethniques inhérente à leur construction, plus précisément à leur peuplement, leur confère une approche différente, pour ne pas dire surprenante pour un Français, dans la gestion des inégalités ; et ce, quelles qu’elles soient. On n’y craint en effet point les comparaisons de chiffres et ne s’épanche guère trop longtemps sur le bienfondé et impacts sociaux éventuels d’une homogénéisation via le législateur. Les Etats-Unis sont ainsi les champions des quotas. Ne compte quasiment que l’expression tangible d'une volonté de gommer les différences ; une vision souvent comptable des problèmes de mixité.


Est-ce donc finalement bien de proposer la congélation des ovocytes pour pouvoir affirmer "vous aussi, aillez les avantages des hommes. Ne choisissez plus entre travail et enfants." ?

A priori non ; en quoi cela constituerait un progrès social ? On peut, au paroxysme, imaginer un patron contraignant ses employées féminines à travailler plus tard et à repousser tout désir de maternité puisqu’il n’y aurait désormais plus de limitation biologique à enfanter "tôt". Toute action en ce sens semble donc condamnable.


Sauf qu’a posteriori, sous une vision des principales intéressées, de quel droit peut-on les entraver de gérer leur propre corps ? Décider du moment opportun, que l’on décide soit, d’avoir ou non un enfant, n’est-ce pas une liberté ultime offerte aux femmes ? Ce n’est pas parce que l’on propose une chose qu’elle revêt un caractère obligatoire. Il s’agit d’une offre personnelle qu'une femme, selon ses propres désirs, peut saisir ou non. Considéré comme une option, c’est un moyen de ne plus avoir à choisir de façon cornélienne entre une envie de parentalité et une envie de réussite professionnelle.

Dit ainsi, ceci s’apparente à la possibilité offerte par l’IVG. Laisser les femmes décider de leurs choix de vie et ; même si cela peut choquer certaines personnes pour des raisons morales ou religieuses ; les considérer compétentes pour elles-mêmes avec le droit de faire, et également assumer, leurs propres choix ; rien à redire.

Le débat fait néanmoins rage sur internet. Les deux points de vue résolument antithétiques des partisans et opposants à la congélation des ovocytes s’affrontent à coups d’arguments plus percutants les uns que les autres. Tout y passe. Comme quoi congeler des ovocytes n’offre aucune garantie sur la procréation avant l’âge ; il n’y aurait pour certains aucune démontration scientifique. On n’établirait, par ailleurs, pas pour d'autres une parité hommes et femmes puisque les hommes, contrairement aux idées reçues, accroissent avec la vieillesse les risques sur leur progénitures.

Quelle que soit la résultante de telles oppositions, on ne peut que souligner une réalité scientifique à la congélation, ainsi qu'une offre financière, par le biais des assurances, proposée aux femmes par ces sociétés de la Silicon Valley. Car ces femmes, notamment et principalement les cadres, enfantent leur premier enfant de plus en plus tard et concilient vie professionnelle et familiale dans un contexte des plus ardus.


Le cœur du problème ne se cacherait-il finalement pas là ? L’arrivée du premier enfant ne serait-il pas un frein à la progression des femmes en entreprise ? N’a-t-on pas pris le problème à l’envers ? Les entreprises ne répondent-elles pas maladroitement à un problème qu’elles ont elles-mêmes créé ? N’aurait-il pas été plus judicieux de s’attaquer au nœud du problème ? Les femmes sont contraintes, à poste égal, d’en faire plus. Elles doivent non seulement faire plus leurs preuves que leurs homologues masculins et ce, c’est une réalité, pour une paie amplement moindre.


Rien que la semaine dernière, la question agitait déjà l’actualité de la Silicon Valley. Satya Nadella, PDG de Microsoft, aurait mieux fait de ne pas venir. Convié à une conférence de la place des femmes dans l’informatique, a-t-il sans s’en rendre compte mis le feu aux poudres. A la question « que conseilleriez-vous aux femmes qui souhaitent une augmentation ? » a-t-il le plus naturellement du monde répondu qu’il ne s’agissait pas de demander une augmentation ; ceci augmentant un « bon karma » que l’employeur remarquerait. Il a renchéri qu'il donnerait plus de responsabilités à celles qui savaient attendre leur accordant volontiers plus sa confiance. La réponse de Satya Nadella n'est peut-être pas choquante pour un patron. Elle est conforme à celle de tout employeur estimant être impartiale quant à la répartition de tâches et salaires dans son entreprise. Il en demeure l'expression d'un véritable tollé sur les réseaux sociaux ; au point que le confus PDG ait dû platement s’en excuser. Sa réponse était en effet on ne peut plus flagrante d'une décorrélation du comportement des patrons avec la réalité du marché du travail des femmes, notamment dans le domaine des nouvelles technologies.


Ainsi aux Etats-Unis les femmes gagnent en moyenne 23% de moins que les hommes à métier et responsabilités équivalentes. Dans le domaine des nouvelles technologies, spécialement dans la Silicon Valley, le taux d’employabilité des femmes est fortement à leur défaveur. 29% de femmes chez Google en général et seulement 17% parmi les ingénieurs. IBM, HP, Microsoft, Oracle, Intel, Yahoo…

A conclure, tous pareils ; bien que certains affichent plus leur volonté de vouloir changer les choses. Facebook et PInterest ont par exemple récemment pris part dans un programme de parrainage des femmes afin de les orienter dans les métiers des nouvelles technologies ; Yahoo aurait fait une communication spécifique, etc.

Reste un sentiment globale de machisme. Le domaine des nouvelles technologies outre-Atlantique semble profondément sexiste ; bien que ce ne soit le seul. Mais qu'en est-il chez nous en France ?

Cruel constat.

Nous ne valons guère mieux ! Tout d’abord niveau cycle d’apprentissage, 11% d’étudiants en écoles d’ingénieur en informatique sont des femmes. On attend péniblement les 20% en licence ou apparenté concernant le domaine du numérique et traitement de l’information.

Côté vie active, les SSII, sociétés de services et d’ingénieries informatiques, ce n’est pas meilleur : un simple 30% en moyenne. Et c’est encore plus déséquilibré si l’on tient compte de la répartition. Elles sont le moins représentées dans le domaine du développement, direction, conseil ; là où les salaires sont les plus intéressants.

Est-ce véritablement du sexisme ?

Car les sociétés dans le domaine des nouvelles technologies sont loin d’être réfractaires à un emploi féminin, c’est plutôt rigoureusement l’inverse. Elles cherchent toutes à féminiser leurs équipes ; avouant que la mixité est plus qu’essentielle et bénéfique. Même les membres de ces dites équipes acquiescent ; ils souhaiteraient fortement se retrouver dans un cadre moins masculin où des réunions, dépassant parfois la quinzaine de personnes, ne propose aucun visage féminin.

Alors ? Est-ce une inadéquation du marché du travail, des emplois proposés ou est-ce une mécanique plus simple ?

Ce qui est certain, c’est qu’il est, malgré la meilleure volonté possible, difficile de trouver des compétences féminines dans ces secteurs. Et pour cause ! La filière ne plairait pas aux étudiantes. Plusieurs théories sociales, sociétales et même comportementales sont alors avancées. Le travail d’ingénieur informatique consiste, pour les postes liés au développement logiciel, à l’architecture des systèmes d’information, à l’administration de serveur ou d’infrastructure réseau, à passer une majeure partie de son temps face à un ordinateur où la notion d’échanges interhumains, sans outillage électronique, est fortement réduit. Ceci serait, selon certains, fortement rebutant pour la gent féminine.


Pour d’autres, il s’agirait plutôt de l’image du geek. Le stéréotype de l'ingénieur informaticien a la vie dure : à la limite de l’autiste, à lunettes, riant aux blagues sectaires que seul lui peut comprendre. Etre une "geekette" n'est pas forcément flatteur. La majorité des écoles/université tentent ainsi de changer cette vision ; aussi bien les grandes (Polytechnique), que les spécialisées (Ingesup, Epita…). Quant aux entreprises, elles affirment ouvertement leur volonté à recruter des talents féminins.


Sauf que ; si pour une fois, nous inversions la donne ? Ce qui est rare est cher, loi du marché aidant ; quand la demande est bien supérieure à l’offre, la valeur de ce qui est souhaité augmente. Messieurs les patrons d’entreprises qui ne l’ont pas compris, à formation et compétence égale, si vous souhaitez féminiser vos employés, commencez par les payer plus que les hommes ; les ovocytes peuvent un peu attendre.

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