Retrouvez Weekly sur Facebook

Temps réels

La Turquie reconstitue le parcours du kamikaze de Sultanahmet

par Orhan Coskun

ANKARA (Reuters) - Nabil Fadli, Syrien né en Arabie saoudite qui a tué dix touristes allemands en se faisant exploser mardi à Istanbul, projetait un attentat majeur dans la nuit du nouvel an à Ankara mais a changé d'objectif après l'arrestation de deux complices, ont déclaré à Reuters deux hauts responsables turcs.

Depuis l'attaque au coeur du quartier touristique de Sultanahmet, les enquêteurs turcs tentent de reconstituer le parcours du kamikaze.

Né en 1988 en Arabie saoudite, où son père était enseignant, Fadli est retourné en Syrie avec sa famille huit ans plus tard.

Après le début de la crise en Syrie, le futur kamikaze aurait d'abord rejoint les forces du groupe rebelle islamiste Ahrar al-Sham il y a deux ans, rapporte un militant syrien, avant de rallier l'organisation Etat islamique (EI). Selon les éléments recueillis, il aurait été capturé et torturé, peut-être par la milice kurde syrienne des Unités de protection du peuple (YPG) - ce que démentent des sources kurdes syriennes.

Fadli, qui n'était ni fiché ni surveillé par les services turcs du contre-terrorisme, est entré en Turquie le 18 décembre et s'est fait enregistrer comme réfugié syrien le 5 janvier à Istanbul, une semaine seulement avant de se faire exploser au milieu de groupes de touristes sur la place Sultanahmet, tout près de la Mosquée bleue et de la basilique Sainte-Sophie.

Mais d'après les enquêteurs, Fadli aurait initialement projeté de commettre une attaque suicide le 31 décembre au soir à Ankara, la capitale, sur la place Kizilay, où la foule se presse habituellement pour célébrer le passage à la nouvelle année.

"Il appartenait à un groupe qui préparait une grande attaque pour le réveillon du nouvel an à Ankara", souligne un haut responsable de la sécurité turque. Deux de ses complices présumés ont été arrêtés le 30 décembre. "Nous pensons qu'il a alors changé de ville pour mener une attaque différente", ajoute-t-il.

Quatre autres individus qui se sont fait enregistrer en même temps que Fadli à Istanbul ont été arrêtés. Ils sont soupçonnés d'appartenance au groupe qui a préparé l'attentat, poursuit ce responsable turc.

Les services turcs ne s'expliquent pas avec certitude pourquoi Fadli et ses complices présumés se sont signalés de la sorte. Certains responsables pensent qu'ils ont agi ainsi pour jeter le doute sur les réfugiés syriens cherchant à gagner l'Europe via la Turquie et compliquer les efforts mis en oeuvre par les Européens et Ankara pour gérer cette crise humanitaire.

Ils pensent par ailleurs que Fadli n'a pu agir sans le soutien d'une force organisée. "Il est évident que cette attaque a bénéficié d'un soutien et nous essayons de l'identifier. Cela pourrait être le PYD (ndlr, le Parti kurde syrien de l'union démocratique) où les moukhabarat (la police secrète du régime syrien)", dit un responsable gouvernemental.

(avec Katie Paul à Dubai, Angus McDowall à Riyadh et Tom Perry et Mariam Karouny à Beyrouth; Henri-Pierre André pour le service français)

Et vous, quel est votre avis ? Exprimez-vous ! Réagissez à cet article.


Suivez-nous

Les auteurs