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La bataille fait rage dans l'hôtel de Ouagadougou pris d'assaut

par Mathieu Bonkoungou et Nadoun Coulibaly

OUAGADOUGOU (Reuters) - Les forces spéciales burkinabès et françaises ont lancé dans la nuit de vendredi à samedi un assaut qui était toujours en cours en début de matinée contre des islamistes présumés retranchés avec des otages dans un hôtel du centre de Ouagadougou, où au moins 20 personnes auraient été tuées.

Alors que de violents échanges de tirs retentissaient dans les étages de l'hôtel Splendid, le ministre de l'Intérieur du Burkina Faso a fait état d'au moins dix morts sur la terrasse du café-restaurant Cappuccino, situé de l'autre côté de la rue. Les deux établissements sont prisés des Occidentaux.

Le directeur de l'hôpital universitaire de Ouagadougou avait déclaré plus tôt dans la nuit que des blessés soignés dans son établissement lui avaient dit avoir vu une vingtaine de corps dans l'hôtel.

Au moins une trentaine d'otages, dont le ministre de la Fonction publique, ont par ailleurs été libérés indemnes et 33 autres évacués vers les hôpitaux pour y être soignés, a indiqué le ministre de la Communication, Remis Dandjinou.

La nationalité des victimes et des otages n'a pour le moment pas été précisée, pas plus que le nombre d'otages qui pourraient se trouver à l'intérieur de l'hôtel.

Une femme européenne soignée à l'hôpital universitaire a déclaré que les assaillants semblaient particulièrement viser les Occidentaux, a déclaré Robert Sangaré, le directeur de l'hôpital.

Le président français François Hollande a dénoncé dans un communiqué une attaque "odieuse et lâche" et assuré son homologue Roch Marc Kaboré de son soutien et de celui des forces militaires françaises présentes au Burkina Faso.

REVENDICATION D'AQMI

L'attaque lancée en début de soirée a été revendiquée dans un communiqué par Al Qaïda au Maghreb islamique (Aqmi), rapporte l'organisation américaine SITE, spécialisée dans la surveillance des réseaux islamistes. Si cette piste se confirme, il s'agirait de la première attaque islamiste à Ouagadougou.

Dans son communiqué, Aqmi précise que l'attentat est l'oeuvre d'une de ses filiales, Al Mourabitoune, un groupe dirigé par le djihadiste algérien Mokhtar Belmokhtar qui avait déjà co-revendiqué il y a deux mois l'attaque contre l'hôtel Radisson de Bamako, au Mali.

Les assaillants, qui seraient au nombre de trois ou quatre et porteraient des turbans, selon des témoins, ont mitraillé le restaurant Cappuccino et incendié des véhicules qui ont explosé avant de se retrancher dans l'hôtel, dont le lobby a par la suite pris partiellement feu.

"Nous venions d'ouvrir quand nous avons entendu des tirs... Il y avait trois hommes qui tiraient en l'air", a raconté un employé du restaurant, Vital Nounayon. "Beaucoup de gens ont abandonné leurs voitures et leurs motos et ont pris la fuite."

Deux voitures incendiées par les assaillants ont explosé et une violente fusillade a éclaté à l'arrivée des forces de l'ordre, a constaté un journaliste de Reuters.

Environ cinq heures après le début de l'attaque, les forces de sécurité burkinabès ont lancé l'assaut. Elles sont appuyées par des forces spéciales françaises, a indiqué le ministre burkinabè de la Communication.

Un membre des forces spéciales américaines et des drones de reconnaissance sont également déployés, a indiqué le Pentagone.

L'hôtel de cinq étages est parfois fréquenté par les militaires français de l'opération Barkhane, force basée au Tchad et dont la mission est la lutte contre les groupes armés djihadistes au Sahel.

L'ambassade de France a mis en place une cellule de crise pour ses 3.500 ressortissants vivant au Burkina Faso et les a appelés à rester chez eux.

UNE AUTRE ATTAQUE DANS LE NORD DU PAYS

Le Burkina Faso a connu des moments troublés depuis le renversement, en octobre 2014, du président Blaise Compaoré à l'occasion d'un soulèvement populaire, mais, à la différence du Mali voisin, le pays, dont la population est à 60% musulmane, avait jusqu'à présent été largement épargné par les violences islamistes.

Cette attaque représente un défi pour Roch Marc Kaboré, élu en novembre 2015, qui a nommé mercredi un gouvernement de 30 membres, parmi lesquels une série de nouvelles têtes marquant une rupture avec l'ère Compaoré.

En décembre, l'ambassade de France a recommencé à ses ressortissants d'éviter de se rendre dans l'est du Burkina Faso après des informations selon lesquelles des djihadistes maliens menaçaient d'enlever des étrangers.

En mai 2015, le groupe Al Mourabitoune avait indiqué détenir un ressortissant roumain enlevé en avril dans une mine du nord du Burkina Faso.

Quelques heures avant l'attaque de Ouagadougou, une autre attaque avait été lancée dans le nord du pays, a indiqué le ministère de la Défense. Un gendarme et un civil ont été tués à Tin Abao par une vingtaine d'hommes armés non identifiés.

En octobre dernier, une cinquantaine d'hommes armés avaient déjà attaqué une brigade de gendarmerie près de la frontière malienne, faisant trois morts. Le gouvernement de l'époque avait imputé cette attaque aux dirigeants d'un coup d'Etat manqué mené le mois précédent par des membres du Régiment de sécurité présidentielle (RSP).

(Danielle Rouquié et Tangi Salaün pour le service français)

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